Européennes : le camp Macron toujours suspendu à la décision du président pour la tête de liste

Alors que se lance la campagne des élections européennes, et que tous les grands mouvements ont désigné leur tête de liste, le camp présidentiel fait figure d’exception.

Le camp Macron toujours suspendu à la décision du président pour la tête de liste aux Européennes (ici Emmanuel Macron le 1er février 2024)
LUDOVIC MARIN / AFP Le camp Macron toujours suspendu à la décision du président pour la tête de liste aux Européennes (ici Emmanuel Macron le 1er février 2024)

POLITIQUE - Comment mener bataille sans son chef ? Alors que se lance la campagne des élections européennes, et que tous les grands mouvements ont désigné leur tête de liste, le camp présidentiel fait figure d’exception : il est toujours sans meneur pour incarner ce combat crucial, notamment face à l’extrême droite, pour le seul scrutin national sur la route de 2027.

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Pire, les refus polis semblent se succéder. L’ancien ministre d’Édouard Philippe Julien Denormandie, un temps pressenti pour prendre la suite d’Élisabeth Borne a Matignon, a indiqué mardi 13 février sur Sud Radio qu’il ne faudrait pas compter sur lui. Avant cela, la presse s’est fait écho de plusieurs niets successifs, de Bruno Le Maire… à Jean-Yves Le Drian.

Le signe d’un certain flottement au plus haut sommet de l’État ? Et de la difficulté de trouver le profil idoine ? « Ça arrive très prochainement, très rapidement mais je n’ai pas de date à ce stade », a répliqué Prisca Thevenot, mercredi 14 février, au sortir du conseil des ministres, inlassablement interrogé, comme le reste du gouvernement, sur cette absence remarquée.

« Pas d’inquiétudes particulières »

En public, il n’y a pas de problème. D’autant, explique-t-on, que ce petit retard à l’allumage est dû à l’entrée au gouvernement de Stéphane Séjourné. L’ancien secrétaire général du parti présidentiel, également chef des députés libéraux au Parlement européen, est devenu ministre des Affaires étrangères à la faveur du dernier remaniement. Problème : il était le seul candidat plus ou moins naturel pour occuper la première ligne.

« Je n’ai pas d’inquiétudes particulières, du fait d’une campagne, on le sait, qui sera courte, avec des enjeux qui se fixeront dans les dernières semaines », plaide ainsi Loïc Signor, le porte-parole de Renaissance, auprès du HuffPost. Pour lui, « on n’est pas loin de l’atterrissage final de la période » du remaniement, et donc de la désignation du chef de file, qui sera alors « 100 % en campagne ». Objectif : d’ici la fin février.

En privé, ce n’est pas forcément la même limonade. Ni la même sérénité. Alors que les différentes chapelles du camp présidentiel (Renaissance - MoDem - Horizons) essaient de se mettre en ordre de marche et phosphorent sur les propositions à mettre en avant, les atermoiements autour de la tête de liste commencent à crisper. Qui plus est après un remaniement étalé sur un mois, propre à mettre les nerfs de beaucoup à rude épreuve.

Emmanuel Macron « n’est pas pressé », nous confirme un conseiller de l’exécutif, mais « d’autres le sont pour lui. » Cette même source pointe d’ailleurs un risque à travers cet attentisme : « plus on repousse, plus on créé de l’attente. Or, je ne vois pas de profil capable de retourner la table », souffle-t-il.

L’effet Attal se fait attendre

« Ça donne à penser que Macron s’en fout un peu de la tête de liste parce qu’il considère que c’est lui et Attal qui vont mener bataille », regrettait de son côté un « pilier d’un parti allié » du président, en début de semaine auprès de Politico.

Il faut dire que cette stratégie ne paie pas dans l’opinion, pour l’instant. En nommant Gabriel Attal à Matignon, flanqué d’un gouvernement resserré mais garni de profil très politiques, Emmanuel Macron voulait une équipe de combat, notamment en vue des élections européennes. Quitte à s’engager lui aussi pleinement dans la campagne, comme l’ont laissé à penser ses vœux aux Français le 31 décembre dernier. Un renouveau qui reste pour l’instant sans effet.

Dans les sondages, la liste du camp présidentiel n’a pas bougé d’un iota entre le départ d’Élisabeth Borne et l’arrivée du populaire Gabriel Attal à Matignon. Au contraire, les dernières études montrent que l’écart entre la liste de la coalition du « bloc central » et celle du Rassemblement national continue de se creuser.

Dans notre dernier sondage YouGov, mesuré début février, le camp présidentiel est crédité de 19 % d’intentions de vote, en dessous du seuil d’alerte des 20 %. Le Rassemblement national de Jordan Bardella lui s’envole à 32 %. De quoi mesurer l’ampleur de la tâche qui attend le futur chef de file de la majorité. Et provoquer des sueurs froides aux soutiens du président ?

« Je ne suis pas inquiet vis-à-vis des enjeux partisans, nationaux de campagne », assure Loïc Signor, « ce qui m’inquiète c’est de voir les sondages partout en Europe » qui attestent du vent favorable dont bénéficie l’extrême droite. Et le porte-parole de Renaissance de résumer l’enjeu du scrutin à ses yeux : « la survie de l’Europe de Delors et Macron, contre celle d’Orban et Le Pen. » Le slogan est là, ne manque plus que le candidat.

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